Vous êtes ici : Version Française > Participer
-
Partager cette page
Culture,
Culture scientifique et humanités
Publié le 3 avril 2019 | Mis à jour le 3 avril 2019
Premier collectage musical
Gaboussi - Crédit : Maëllis Daubercies Abril
Il est 10 heure, le bus 7 me conduit vers le cœur de Vaulx-en-Velin. Je ne suis encore jamais passée par ici. Je sonne au pied d’un immeuble, on m’ouvre une porte, on m’invite à entrer. C’est mon premier collectage.
Trois hommes d’une petite quarantaine d’années m’attendent au salon, ils sont un peu intimidés, moi aussi. Une discussion s'engage. J’en profite pour déballer tout mon attirail : un imposant enregistreur Tascam, pied de micro, micro, deuxième enregistreur, appareil photo. Une fois le tout branché, j’allume mon enregistreur un peu l’air de rien, j’hésite, je ne sais pas quelle méthode employer. Je m’étais préparé une fiche de questions mais le petit groupe commence directement à jouer. Un clavier, une basse et un gaboussi, objet principal de mon intérêt ce matin-là, débutent un air de musique traditionnelle comorienne. Je suis un peu prise au dépourvu, je préfère rebondir sur ce que je viens d’entendre plutôt que suivre le questionnaire que je m’étais préparé.
La discussion se détend, elle se fait progressivement plus fluide. Je découvre que le travail de collectage est un exercice subtil voir acrobatique : il s’agit de ne pas perdre de vue les informations à rechercher, tout en rebondissant sur les propos de la personne collectée, tout en passant un moment agréable pour mettre la personne en confiance mais sans pour autant trop parler au risque de gâcher le futur documentaire sonore...
J’apprends que tous viennent de l’archipel des Comores, de Mayotte et d’ailleurs. Il est apparemment rare que des personnes de différentes îles se retrouvent pour jouer ensemble des wadaha, toirab ou mbiwi, des courants musicaux associés à une rythmique et souvent à une danse. J’ai du mal à comprendre si les airs viennent directement du répertoire traditionnel et sont interprétés tels quels ou s’il y a réappropriation et modification. Le gaboussi est un très bel instrument, c’est un petit luth en bois de baobab dont la caisse et le manche ne forment qu’une seule et même partie. Il comporte 5 cordes. La table d’harmonie est recouverte par une peau de chèvre ce qui lui donne un son un peu nasal.
Au bout de 2 heures d’enregistrement alternant entre discussion et musique, je me dis que je devrai peut-être penser à laisser ces messieurs tranquilles. Je range mon matériel tout en les remerciant chaleureusement pour le temps qu'ils m'ont accordé.
C’est en fermant la porte de l’immeuble que je commence à prendre conscience de tout ce que j’ai oublié de demander… l’exercice du collectage ne s’apprend sûrement pas en une seule fois.
Maëllis Daubercies Abril
La discussion se détend, elle se fait progressivement plus fluide. Je découvre que le travail de collectage est un exercice subtil voir acrobatique : il s’agit de ne pas perdre de vue les informations à rechercher, tout en rebondissant sur les propos de la personne collectée, tout en passant un moment agréable pour mettre la personne en confiance mais sans pour autant trop parler au risque de gâcher le futur documentaire sonore...
J’apprends que tous viennent de l’archipel des Comores, de Mayotte et d’ailleurs. Il est apparemment rare que des personnes de différentes îles se retrouvent pour jouer ensemble des wadaha, toirab ou mbiwi, des courants musicaux associés à une rythmique et souvent à une danse. J’ai du mal à comprendre si les airs viennent directement du répertoire traditionnel et sont interprétés tels quels ou s’il y a réappropriation et modification. Le gaboussi est un très bel instrument, c’est un petit luth en bois de baobab dont la caisse et le manche ne forment qu’une seule et même partie. Il comporte 5 cordes. La table d’harmonie est recouverte par une peau de chèvre ce qui lui donne un son un peu nasal.
Au bout de 2 heures d’enregistrement alternant entre discussion et musique, je me dis que je devrai peut-être penser à laisser ces messieurs tranquilles. Je range mon matériel tout en les remerciant chaleureusement pour le temps qu'ils m'ont accordé.
C’est en fermant la porte de l’immeuble que je commence à prendre conscience de tout ce que j’ai oublié de demander… l’exercice du collectage ne s’apprend sûrement pas en une seule fois.
Maëllis Daubercies Abril